Le concept même de psychomotricité rend compte de la liaison constante entre corps et psychisme ; ces deux entités ont souvent été pensées séparement. De longues années de débats philosophiques n’ont pas réussi à résoudre la dichotomie corps-esprit. Le corps ne serait-il que « matière » ? et « l’esprit » ne nous offrirait-il qu’un supplément d’âme ? Dans ce schéma occidental, ou se placerait l’affectif ? Alors remontons quelques instants le temps et parcourons les siècles l’espace de quelques phrases pour visiter ces thèmes et ces images…
Grecs : « l’homme est âme et corps » Platon, mais c’est l’âme qui domine, qui en est la partie maîtresse, le principe et le but. Aristote : Le corps est la matière de l’âme, l’âme est la forme du corps, leur conjonction détermine un être naturel vivant.
» parmi les corps naturels, les uns ont la vie, cependant que les autres ne l’ont pas ; et par vie, nous voulons dire la propriété de par soi-même se nourrir, croître et dépérir. Si bien que tout corps naturel, ayant la vie en partage, peut être substance, une substance, cependant, comme on l’a dit, composée. Mais, puisque c’est précisément un corps qui a cette propriété, càd possède la vie, le corps ne saurait être l’âme. Le corps, en effet, ne se range pas dans les réalités qui se disent d’un sujet, mais se présentent plutôt comme sujet ou matière. »
Latins : « Une âme saine dans un corps sain »
Augustin : De la distinction réelle entre l’âme et le corps ; preuve et définition du corps.
Moyen Age : l’âme est un terme absolu et le corps est une entrave avilissante, dégradante. (prégnance importante du concept religieux)
XVIe siècle : « L’âme par laquelle je suis ce que je suis est entièrement distincte du corps » Descartes, on sera confronté à deux courants, anatomie et physiologie du corps dans un premier temps et psychologie de l’âme, de la conscience dans un deuxième temps.
Descartes : La démonstration de la réalité de l’esprit, de son existence, de sa radicale différence avec le corps.
» Je suis, j’existe ; cela est certain ; mais combien de temps ? A savoir autant de temps que je pense ; car peut-être même qu’il se pourrait faire, si je cessais de penser que je cesserais en même temps d’être ou d’exister. Je n’admets maintenant rien qui ne soit nécessairement vrai : je ne suis don, précisément parlant, qu’une chose qui pense, càd un esprit, un entendement ou une raison, qui sont des termes dont la signification m’était auparavant inconnue. Or je suis une chose vraie et vraiment existante ; mais quelle chose ? Je l’ai dit : une chose qui pense. Et quoi davantage ? J’exciterai mon imagination pour voir si je ne suis point encore quelque chose de plus. Je ne suis point cet assemblage de membres que l’on appelle le corps humain ; je ne suis point un air délié et pénétrant répandu dans tous ces membres ; je ne suis point un vent, un souffle, une vapeur, ni rien de tout ce que je puis feindre ou imaginer, puisque j’ai supposé que tout cela n’était rien, et que, sans changer cette supposition, je trouve que je ne laisse pas d’être certain que je suis quelque chose. » (Deuxième MM, Quadrige, p. 42)
XIX siècle : Le terme psychomotricité aurait été initialement conçu en Allemagne en 1844 par Wilhelm Griesinger, fondateur de la neuropsychiatrie et repris ensuite en France. Charcot est un des premiers à disséquer des corps et de faire une distinction entre âme et corps.
XXème siècle
« Aujourd’hui encore, le programme synthétique de la philosophie concernant le concept de corps demeure à l’ordre du jour. Chaque discipline propose une représentation spécifique du corps : la médecine, la biologie, la chimie, le sport, la religion, la mode…il reste à unir et unifier ces points de vue en un usage de soi, un peu comme le préconisait Michel Foucault lorsqu’il proposait de reprendre l’antique conception de la philosophie. Non seulement un usage des plaisirs, de la sexualité, mais aussi un usage du corps médicalisé, du corps sportif, du corps anorexique ou greffé… ce qu’essaient de faire des philosophes aussi divers dans la tradition française que G. Deleuze, M. Foucault, M. Serres, M. Henry, P. Legendre. Comment redonner chair au corps ? Sans doute la sociologie converge vers ce même questionnement en décelant les fondations sociales du corps en ce qu’il a de proprement humain. Même si la philosophie fait le pari que cette mise à jour de la constitution sociale du corps ne suffit pas à expliquer ce qu’est le corps, elle doit aussi en tenir compte pour l’intégrer à sa propre tradition, quitte à en déplacer les enjeux et les catégories selon les données actuelles. »
La psychomotricité a toute sa place dans ce domaine et c’est aux psychomotriciens d’en faire la preuve.
1907
Mise en évidence du syndrome de débilité motrice par Dupré, élève de Charcot (neurologue français)
1925
1930
1935
1937-1940
1947
Le Professeur J. de AJURIAGUERRA et son équipe développent à l’Hôpital Henri Rousselle une nouvelle thérapeutique appelée « Rééducation Psychomotrice ». Il forme des « spécialistes en conférences ».
1957
1959
1962
Création de l’enseignement de la Rééducation Psychomotrice dans le cadre de la Faculté de Médecine de Paris – Hôpitaux Henri Rousselle et de la Salpêtrière.
4 février 1963
Par décret de Monsieur le Ministre de l’Education Nationale, création du Certificat de Capacité en Rééducation Psychomotrice.
1964
Première promotion professionnelle composée de 25 rééducateurs en psychomotricité.
Création du Syndicat National des Rééducateurs en Psychomotricité (S.N.R.P.), dont l’action consistera en premier lieu à la reconnaissance d’un diplôme d’Etat Hospitalo-Universitaire.
1965
Création de la première revue pour les psychomotriciens (par le S.N.R.T.P.) : la Revue Thérapie Psychomotrice
1967
Création du premeir enseignement privé, ISRP à Paris
Juin 1969
Une table ronde réunit, au Ministère de l’Education Nationale, en présence d’un représentant du Ministère de la Santé, les enseignants dont les professeurs MICHAUX, BLANC, DUCHE, les rééducateurs en psychomotricité (syndicat, société), et les étudiants. Cette rencontre aboutit au projet de création d’un Diplôme d’Etat en Psychomotricité (bac + trois années d’études).
Décembre 1969
Premières Journées Annuelles de Thérapie Psychomotrice, organisées par le S.N.R.T.P. (Syndicat National des Rééducateurs et Thérapeutes en Psychomotricité, actuellement S.N.U.P.).
1970
Le projet de création d’un Diplôme d’Etat en psychomotricité est suspendu par le Ministère de la Santé.
1971 – 1972
Entrevues, réunions d’experts au Ministère de la Santé et au Ministère de l’Education Nationale.
Plusieurs projets de formations sont sérieusement mis à l’étude. Un des projets prévoie la mise en place d’un tronc commun pour l’ensemble des professions paramédicales avec une spécialisation ultérieure.
1972
Création de la Fédération Française des Psychomotriciens (FFP), suite à une scission du S.N.R.T.P.
10 juin 1972
La Commission d’experts, réunie par le Ministère de la Santé Publique et de la Sécurité Sociale et par le Ministère de l’Education Nationale, étudie le décret portant sur la création d’un Diplôme d’Etat de rééducateur en psychomotricité. Cette élaboration est de nouveau suspendue par le changement de gouvernement.
Novembre 1972
Vives réactions de la Fédération Nationale des Masseurs-Kinésithérapeutes qui entend s’opposer à la création du Diplôme d’Etat en Psychomotricité et à la reconnaissance de cette profession.
19 décembre 1972
Une manifestation regroupant 1200 étudiants et rééducateurs en psychomotricité se rend à l’Hôtel Matignon, où est reçue leur délégation. Ils y déposent les 10 000 pétitions accompagnant leurs motions.
Décembre 1972
Par une proposition de loi (n° 2688) relative à la profession de Masseurs-Kinésithérapeutes et aux auxiliaires médicaux, les masseurs-kinésithérapeutes tentent de s’arroger le monopole de la thérapie psychomotrice.
Cette proposition de loi fait l’objet d’une discussion de la Commission des Affaires Sociales, Familiales et Culturelles.
Mars 1973
Première journée de rencontre entre professionnels et étudiants. Plus de 2000 professionnels ont leur place dans les équipes de Santé Mentale et précisent de plus en plus la spécificité de leur profession qui devient indispensable dans le traitement des enfants et adultes en psychopathologie.
1974
Diplôme d’Etat
Un décret N° 74-112 portant création du Diplôme d’Etat de Psychorééducateur a été promulgué en date du 15 février 1974, sans consultation préalable des organisations représentatives et signataires des Conventions Collectives.
Ce diplôme est délivré sous l’égide du Ministère de la Santé Publique, contrairement à ce que demandait le S.N.R.T.P., à savoir : un Diplôme Hospitalo-Universitaire délivré conjointement par les Ministères de la Santé et de l’Education Nationale.
Enseignement Faculté de médecine de Bordeaux
Enseignement privé, Toulouse
3 mars 1974
Une motion est rédigée au cours d’une journée de rencontre entre professionnels et étudiants. Les pétitions correspondantes recueillent 4000 signatures.
Lettre au Premier Ministre signée par de nombreux médecins et professeurs.
Avril 1974
Lettre au Ministre de la Santé Publique et de la Sécurité Sociale, signée par des directions de centres de formation + soutiens internationaux (Suisse et Belgique) et intersyndicaux (grandes centrales : CGT, FO, CFTC).
Délégation intersyndicale reçue à l’Hôtel Matignon et dépôt d’une plate-forme revendicative.
J.O. (Journal Officiel) des 4 et 7 octobre 1974
Premières modalités d’exécution du décret n°74-112 du 15 février 1974 concernant l’organisation des études.
Octobre 1974
Protocole d’accord créant un statut professionnel et une grille de salaire dans la Convention Collective de l’Enfance Inadaptée (1966).
J.O. du 10 décembre 1974
Arrêté du 6 décembre 1974 relatif aux conditions d’attribution, par équivalence, du D.E. de psychorééducateur. Les certificats de capacité de rééducation de la psychomotricité équivalent au D.E. de psychorééducateur.
1975
Enseignement Faculté de Lyon
Avril 1975
Mise en place et inauguration par Mme Simone VEIL, Ministre de la Santé, du Conseil Supérieur des professions paramédicales.
1975-1976
Juin 1976
Le Conseil d’Etat annule le décret n° 74-112 portant création du D.E. de Psychorééducateur, ainsi que tous les arrêtés d’application qui y sont relatifs, pour vice de forme.
Les requêtes en annulation du décret n° 74-112 émanent de :
- L’ISRP qui conteste l’agrément des centres de formation et les modalités d’organisation du concours. Requête acceptée.
- La Confédération Nationale des auxiliaires médicaux avec la Fédération des kinésithérapeutes français, pour interdire le monopole. Requête rejetée.
19 août 1976
Publication par le Ministère d’une nouvelle élaboration des textes de 1974.
Décembre 1976
Pétition contre le terme de “Psychorééducateur”.
Décembre 1978
Lettre ouverte à Madame Simone VEIL, Ministre de la Santé.
26 janvier 1979
Journée d’action unitaire des professionnels et les étudiants : grève, pétition et manifestation au Ministère de la Santé, puis à l’Elysée, concernant le statut de la profession et les problèmes de la formation.
5 février 1979
Une intersyndicale est reçue au Ministère de la Santé.
14 mai 1979
Motion de soutien du SNPP (Syndicat National des Psychiatres Privés).
Entre 1978 et 1980
Six propositions de lois tendant à donner aux psychomotriciens un statut d’auxiliaire médical. Aucune proposition n’a jamais abouti.
3 avril 1980
Décret n° 80-253 relatif au statut particulier de certains agents des services médicaux des établissements d’hospitalisation publics et de certains établissements à caractère social. Mis au point sans nous consulter, ce décret nous procure donc un statut hospitalier, mais il ne s’agit nullement d’une reconnaissance de notre spécificité et de nos conditions de travail.
6 et 7 décembre 1980
Xèmes Journées Annuelles de Thérapie Psychomotrice organisées par le S.N.R.T.P. sous la présidence de Monsieur Jack RALITE, Ministre de la Santé, représenté par Monsieur LOTZNENOU, Médecin Inspecteur Départemental.
Février 1982
Dépôt d’un dossier complet sur la profession de psychomotricien à Monsieur Jack RALITE, Ministre de la Santé.
6 novembre 1982
Le S.N.R.T.P. devient le Syndicat National d’Union des Psychomotriciens (S.N.U.P.)
Décembre 1984
Création d’une commission issue du Conseil Supérieur, sous la présidence du Professeur WIDLOCHER, pour définir le champ de compétence du psychomotricien.
Février 1985
Décret n° 85-188 modifiant celui du 15.02.74, remplaçant le terme “psychorééducateur” par celui de “psychomotricien”.
Fin 1985
Avant projet de décret faisant suite aux travaux de la Commission WIDLOCHER avec pour notre seule profession une restriction contenue dans l’article 1° rédigé sans concertation avec le conseil.
1986 – 1987
Des professionnels sensibilisent des Députés sur l’absence de réglementation de la profession.
Création d’un secteur formation continue au S.N.U.P.
1987
Création de l’AFEPP
22 juin 1987
A l’Assemblée Nationale : question écrite de Catherine TRAUTMANN sur l’absence de statut des psychomotriciens.
6 mai 1988
Le décret n° 88.659 pris en application de l’article L. 372 du code de la Santé Publique, fixe la liste des actes du champ de compétence des psychomotriciens.
Janvier 1990
XIXèmes Journées Annuelles de Thérapie Psychomotrice à Paris organisées par le S.N.U.P. sur le thème “Psychoses, psychomotricité, états limites ?”
5 juin 1990
Mr BAUDURET, chef de cabinet du Ministre de la Santé, reçoit une délégation du S.N.U.P.
Janvier 1991
XXèmes Journées Annuelles de Thérapie Psychomotrice à Strasbourg sous le haut patronage de Catherine LALUMIERE, Secrétaire Générale du Conseil de l’Europe, et de Catherine TRAUTMANN, Maire de Strasbourg et Député Européen.
Février 1995
Loi N° 95-116 du 4 février 1995 parue au J.O. le 5 février 1995. Inscription au Livre IV du code de la Santé Publique de la profession de psychomotricien.
Actes professionnels que les psychomotriciens sont habilités à accomplir.
1996
Mme DEUXDENIERS reçoit une Délégation du S.N.U.P. sur la question du remboursement des actes.
1997
Des réunions de travail entre l’AFEPP, la FFP et le S.N.U.P. ont lieu afin de tenter d’élaborer des liens et de réfléchir à une plate-forme commune. XXVIèmes J.A. : “Psychomotricité, un acte thérapeutique – Recherches et conceptualisation”.
1997
Nouvelle rencontre avec Mme DEUXDENIERS et amorce du travail avec le cabinet de Martine AUBRY auprès de Mme DUX (Ministère de la Santé).
1998
Poursuite du travail avec Mme DUX. Rencontre avec M. MACQUARD et Mme CUVILLIERS.
Des réunions plus ou moins régulières ont lieu entre les trois organisations professionnelles afin d’élaborer un projet d’extension du décret de compétence à partir d’un document proposé par le S.N.U.P.
Suite à une proposition de la FFP, un sondage auprès des adhérents du S.N.U.P. fait ressortir qu’à plus de 60% ils refusent la fusion entre les trois organisations professionnelles, mais préfèrent qu’une expérience de travail commun puisse être fructueuse.
Le S.N.U.P. dépose un dossier complet au Ministère de la Santé concernant :
- une extension du décret de compétence,
- une proposition de nomenclature,
- une convention (Sécurité Sociale),
- un code de déontologie,
- une éthique professionnelle.
1999
Les rencontres avec Mme DUX ont été régulières ainsi que les contacts avec Mme DEUXDENIERS.
Avril 1999
Un courrier envoyé à l’ensemble des Députés a permis d’accroître la pression sur le Gouvernement, l’obligeant à donner clairement sa position.
Mai 1999
Un nouvel avant projet du décret d’actes élaboré par la commission mixte permanente AFEPP/SNUP est déposé auprès du Ministère.
2004
Le S.N.U.P. fête ses 40 ans
Décret n° 2004-802 du 29 juillet 2004. Relatif aux parties IV et V (dispositions réglementaires du nouveau code de la Santé Publique). Ce décret rassemble l’ensemble des textes cités sur cette pages et devient la référence actuelle pour l’ensemble des professions d’auxiliaires médicaux. (NOR : SANP0422530D)
Décembre 2009
Ouverture des travaux des travaux de réingénierie des professions paramédicales pour les psychomotriciens.
2010