THERAPIE PSYCHOMOTRICE – et recherches – n°170/2012

Les thérapeutiques psychomotrices à l’épreuve de l’adolescence

Couv170

L’engouement qui parcoure actuellement les champs de la clinique et de la recherche à propos de cette période de transition essentielle que constitue l’adolescence du sujet humain a généré depuis déjà plusieurs années des réflexions plurielles qui (personne ne le niera) ont eu un impact certain sur la prise en charge des adolescents en général. La rencontre clinique avec ces jeunes sujets, véritables « adultes en devenir » engagés dans un travail de subjectivation complexe, a en tout cas rapidement nécessité, notamment dans le contexte des manifestations psychopathologiques qui peuvent s’y déployer, le déploiement d’une forme d’inventivité nouvelle pour penser et créer des dispositifs thérapeutiques adéquats. La poussée pulsionnelle à l’oeuvre (issue certes de la puberté mais aussi des remaniements psychiques qui l’accompagnent), la prédominance de la place donnée au corps et à l’acte ainsi que les enjeux relationnels multiples impliqués à cet âge de la vie deviennent dès lors des données incontournables à prendre en compte dans le cadre de soins qui, bien souvent, vont essayer de contenir et de donner forme à des mouvements psychiques d’une rare intensité.

Un fait, dans ce contexte, reste toutefois étonnant, notamment lorsque nous le considérons dans le cadre du champ de la psychomotricité : s’il paraît désormais évident que les souffrances rencontrées par les adolescents nécessitent leur prise en charge, il semblerait que, dans le passé, la pertinence de la place que pourraient prendre les praxis psychomotrices auprès de cette population n’ait pas toujours fait l’objet (et loin de là !) d’un consensus. Que ceci ait pu être écrit ou simplement parlé voire ébruité, il semblerait en tout cas que l’idée de proposer à des adolescents des thérapies à médiation corporelle n’ait guère été une évidence. Cela s’explique certainement tout d’abord par une forme de prudence louable qui vise à ne pas évacuer les enjeux corporels liés à la « surchauffe » pulsionnelle et libidinale à laquelle l’adolescent est soumis ainsi qu’à toute la question de l’avènement de la sexualité génitale. Dans ce contexte, proposer un suivi en psychomotricité auprès de l’adolescent pourrait ressembler à une forme de grave méconnaissance de la dynamique dans laquelle se trouve plongée l’image du corps : ne risque-t-on pas dès lors de venir, à grand renfort d’excitation, aggraver une forme de fragilité déjà bien présente ? Se peut-il aussi que la sexualisation du lien objectal sur un mode génital (avec toute la part de séduction potentiellement traumatique qui l’accompagne) constitue en soi une contre-indication majeure à une forme de prise en charge en psychomotricité ?

C’est à partir de cet argument que nous vous proposons désormais de considérer les écrits qui vont suivre, avec (très modestement) l’idée de pouvoir dépasser ces questions pour surtout illustrer la façon dont les psychomotriciens travaillent avec les adolescents aujourd’hui…

L’interview de notre collègue Catherine POTEL, clinicienne et chercheuse, nous permettra de poser quelques bases de réflexions autour de ce sujet, à partir de son récit de certaines expériences cliniques ainsi que des perspectives théoriques qui les accompagnent et permettent de penser le cadre des rencontres avec les adolescents en psychomotricité…

Elle sera suivie par un article de Charlotte PAUMEL, psychomotricienne qui s’est intéressée de façon originale aux enjeux de la rencontre avec l’adolescent autour du bilan, illustrant ainsi toute la pertinence de la proposition de ce dernier à cette population et en tirant un certain nombre d’idées importantes.

L. BIELER et I. CHARPINE-PISCAGLIA nous donneront elles une vivante illustration clinique de ces pratiques avec les adolescents, précisant différentes modalités d’accueil de ces derniers en terme de cadre mais aussi les opérateurs théoriques qui les soutiennent dans ces rencontres.

Nous aborderons ensuite deux articles « Hors thèmes » écrits respectivement par Damien GALMISH puis E. DEVANNE. Si le premier constituera une illustration argumentée et complexe autour de la question de l’autisme infantile et de l’approche théorico-clinique qui peut en être faite en psychomotricité, le second s’intéressera lui à la question des troubles en psychomotricité et apporte de précieux éléments de compréhension pour pouvoir articuler les notions de thérapie et de rééducation sans toujours les opposer. Véritables plaidoyers pour la complexité, ces deux écrits vont en tout cas dans le sens d’une vision plurielle de l’approche psychomotrice, bien secourable en des temps où il semblerait qu’elle soit sommée dans certains espaces de « choisir son camp » de façon grossière et caricaturale.

Enfin, ce numéro se terminera par un tryptique de textes ayant tous pour point commun la référence à la notion de trace(s) : il s’agit là de la publication des actes d’une journée régionale qui avait servi de « prélude » aux JA de Strasbourg (organisée en 2010 autour du même sujet). Mis en perspective avec le numéro 169 de notre revue (qui reprenait lui tous les textes de ces journées annuelles), ces trois contributions (d’Odile Frand, de Marie Alice Du Pasquier et de Roland GERBER) permettront de prolonger les réflexions exposées dans ce précédent numéro et d’ouvrir vers d’autres voies…

En vous souhaitant bonne lecture…

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