THERAPIE PSYCHOMOTRICE – et recherches – n°168/2011

Variations cliniques : Récits de cas singuliers

couv168La revue thérapie psychomotrice -et Recherches- a toujours eu pour ligne directrice éditoriale d’accorder à la dimension clinique de la psychomotricité toute la place qui lui revient ce qui lui vaut probablement de la part des professionnels un engouement et une fidélité qui jusqu’ici n’a jamais été démentie.

Au moment où la clinique est mise à mal dans nos institutions où la logique administrative et son goût immodéré pour les protocoles et évaluations quantitatives nous éloigne inexorablement des préoccupations des sujets dont nous nous occupons, il devient plus que nécessaire de défendre l’idée que les savoirs cliniques fondée sur l’observation et l’analyse approfondie des cas individuels ou des groupes sont une richesse tant pour l’institution que pour le praticien.

Ces savoirs empiriques issus de la rencontre de deux corps et deux psychés ne sont en aucune façon substituables voire opposables à un savoir constitué fusse t’il paré de tous les attributs de la scientificité.

Il existe aujourd’hui une nécessité impérieuse à restaurer dans nos institutions la dimension clinique et intersubjective de nos approches. Une nécessité à ne plus considérer que l’individu pourrait être étudiée d’une façon isolée des enjeux interactifs et intersubjectifs sous prétexte que ces éléments sont au-delà de toute possibilité d’évaluation. Un nécessité de réduire l’écart entre décideurs, chercheurs et cliniciens.

Pour introduire ce numéro consacré à la clinique quoi de plus logique et stimulant que de commencer par un texte de Catherine POTEL. Ce texte est issu d’une conférence donnée avec le Dr Chauvet le 22 juin 2011, dans le cadre des conférences de formation à la psychanalyse de la SPP. Catherine POTEL nous y relate le parcours thérapeutique de Sybille une jeune enfant de 10 ans dont le corps est souvent mis à rude épreuve. Au-delà du cas singulier de Sybille avec le tact clinique qui la caractérise Catherine POTEL nous engage dans une réflexion plus générale sur « ce qu’un travail corporel peut avoir de spécifique pour favoriser la remise en chantier des symbolisations primaires si essentielles dans le processus de construction identitaire. »

Dans un texte issu d’une intervention aux journées d’études nationale des CMPP sur le thème de « L’enfant connecté » Roland OBEJI nous livre une réflexion clinique sur le rapport au corps singulier d’un adolescent de 13 ans. La place du numérique et du virtuel dans la vie des adolescents que nous suivons est ici posée et avec beaucoup de pertinence Roland OBEJI soulève la question centrale à laquelle nous sommes particulièrement confrontés : quid de la place singulière du corps dans cette fascination du virtuel ? Face à cette question qui suscite tant de débats entre nous, je vous laisse découvrir avec plaisir les pistes de réflexions ouvertes par Roland OBEJI.

Carole GETIN et Anne Chantal FERCHAUD nous font part dans cet article consacré à la clinique de l’adolescente anorexique prépubère de leur expérience et de la mise en place d’un dispositif thérapeutique dans le cadre d’une unité d’hospitalisation. Face à cette clinique du clivage si angoissante pour les familles et les soignants, l’articulation entre un dispositif institutionnel bien pensé et des thérapeutiques à médiation où la psychomotricité à toute sa place offre une réponse thérapeutique au plus près des caractéristiques de ces patients. La pertinence des propositions thérapeutiques ainsi que la richesse des réflexions cliniques soulevées par Carole GETIN et Anne Chantal FERCHAUD ne manqueront de susciter l’intérêt des lecteurs.

C’est autour de sa rencontre mouvementée avec Marie une jeune fille au comportement perturbateur que Laurent BRANCHARD nous propose une réflexion sur la spécificité du cadre psychothérapeutique en psychomotricité. Bien des psychomotriciennes et psychomotriciens se retrouveront dans la lecture de ce récit clinique où l’auteur avec une grande honnêteté n’a rien sacrifié de ses doutes et questions. Notamment les questions sur l’aspect psychothérapeutique des interventions en psychomotricité et sur la place à accorder aux interprétations verbales. Si comme le souligne avec justesse Laurent BRANCHARD « le cas singulier apporte plus de questions qu’il ne dévoile de vérités » nous lui sommes gré de la grande qualité et originalité de ses réflexions dans un domaine où pourtant bien des choses ont été écrites.

Enfin pour conclure cette première série d’écrits cliniques Yolande FRADET-VALLEE nous livre au travers plusieurs vignettes cliniques une réflexion d’envergure sur « les bienfondés des pratiques thérapeutiques à médiation corporelle ». En personnifiant ses récits Yolande FRADET-VALLEE nous livre une vision humaniste du soin en psychomotricité, qu’elle en soit ici remerciée.

Nous poursuivrons cette série d’écrits cliniques par les présentations de Lise MOLINA, Marion Bernard et Précylia BATISTA qui ont pour dénominateur commun d’appuyer leurs pratiques respectives sur le travail de « Structuration psycho-corporelle » dont s’inspirent de nombreux psychomotriciens dans leurs pratiques. En introduction de ces textes Benoit LESAGE praticien, formateur et auteur bien connu des psychomotriciens, nous livre le cadre historique et conceptuel dans laquelle se fonde la pratique psychocorporelle. Ces textes d’une remarquable qualité d’écriture même pour le clinicien ignorant du cadre conceptuel et pratique que constitue l’approche psycho-corporelle sont une source de réflexion permanente sur l’intérêt de l’engagement corporel dans le soin en psychomotricité. Ces écrits sont issus d’un ouvrage à paraître prochainement (1). Nous remercions les éditions Eres ainsi que Benoit LESAGE pour la confiance qu’ils nous ont accordée en nous permettant de publier certains de ces textes.

Dans la rubrique Hors-thème nos collègues suisses Nathalie SCHMID NICHOLS et Sylvie WAMPFLERBENAYOUN nous entrainent dans une discussion passionnée et passionnante sur la recherche en psychomotricité. A un moment où les enjeux sur le devenir de la clinique comme nous l’avons souligné en introduction passeront, n’en doutons pas, par une réorientation de la recherche au plus près de la clinique et des préoccupations de terrain, les propositions de Nathalie SCHMID NICHOLS et Sylvie WAMPFLERBENAYOUN en matière de recherche clinique méritent tout notre intérêt. Enfin nous retrouvons en guise de conclusion une réflexion de Laurent BRANCHARD sur une approche épistémologique de la psychomotricité qui prend tout son sens au regard des évolutions actuelles de la formation initiale en psychomotricité.

Bonne lecture à toutes et à tous

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