ENJEUX DE LA RELATION EN PSYCHOMOTRICITÉ
Placée de façon privilégiée sous le double signe du lien et du corps, la nature de la relation qui se noue entre le psychomotricien et son patient demeure complexe, plurielle et protéiforme. Loin d’appeler un concept exclusif pour en éclairer la nature, cette problématique sollicite de fait plusieurs dimensions qui peuvent se soutenir de différentes théorisations. L’histoire de notre profession et des recherches menées sur ce sujet témoigne des écarts parfois considérables qui se sont déployés entre d‘une part les partisans d’une référence trop exclusive au fameux transfert mis en évidence par la psychanalyse et de l’autre le maniement parfois peu mesuré chez certains professionnels de l’utilisation de la suggestion, avec toute la part d’influence et de séduction qu’elle peut venir mobiliser.
Tandis que la dimension parfois trop psychologique de l’analyse de ces enjeux tendait à faire oublier le corps et la célèbre notion de dialogue tonico-émotionnel élaborée par Ajuriaguerra, la difficile articulation entre des terminologies aussi confuses et différentes que celles d’empathie, d’identification ou encore d’étayage venait de son côté complexifier considérablement les choses.
Ces questions fondamentales, quoiqu’on en dise, restent toujours d’actualité pour chaque psychomotricien qui, dans le soin qu’il propose, soutient, accompagne, écoute, touche son patient, jusqu’à même parfois se proposer comme support de certaines identifications. Les processus ainsi mobilisés ont toujours été perçus par la profession comme aussi difficiles à analyser et à théoriser que d’une importance capitale.
Nous nous retrouverons donc ici à proposer matière à penser ces enjeux grâce à une longue interview de C. Robineau qui nous fera bénéficier de ses éclairages pour tenter d’actualiser nos connaissances sur le sujet.
Par la suite, trois textes, bien qu’indirectement centrés sur cette thématique, nous inviteront à penser la clinique singulière du soin périnatal.
Par le biais d’une interview du Pr Picaud et de son expérience en néo-natalogie, d’un texte de M. Perrier-Genas évoquant la spécificité du travail du psychomotricien dans un tel service et enfin du récit décrivant un dispositif original de consultation pédiatre/ psychomotricien (E. Goiset et M. Perrier-Genas), plusieurs dimensions cruciales liées à ces pratiques et aux rencontres qui s’y déploient seront ainsi décrites et analysées…
A.-M. Latour, toujours guidée par ses recherches et élaborations sur l’autisme, envisagera ensuite, dans les pages suivantes, des éléments théorico-cliniques s’intéressant à l’émergence des toutes premières traces psychiques en lien avec les éprouvés sensori-moteurs. Elle le fera notamment à partir d’une dialectique se situant entre objet et sujet, intégrant la notion d’image du corps ainsi que le rôle des médiations thérapeutiques, supports privilégiés de la relation dans le champ de la psychomotricité.
Dans la rubrique « Recherches », nous retrouverons la thématique de l’autisme abordée par C. Panisset-Pallier : la référence à la notion d’auto-contacts chez les enfants autistes y ouvre de nouvelles pistes pour comprendre les enjeux de leur relation à leur corps et à l’autre…
Enfin, la rubrique « Ailleurs » permettra à C. De Léon de nous parler de l’actualité des pratiques des psychomotriciens en Uruguay, fruit d’une histoire singulière et de l’association de plusieurs modèles théoriques…
En vous souhaitant bonne lecture…
Christian ROBINEAU
Psychologue clinicien, ancien psychomotricien. Unité petite enfance Les Pépinières, CMP du secteur de psychiatrie infanto-juvénile I-06 des Yvelines (Versailles), Hôpital de jour pour adolescents Les Vignolles (Ermont). Cofondateur du CERPP (Centre d’études et de recherches psychomotrices et psychothérapiques) et de L’Escabelle (association de recherche et de formation en périnatalité et petite enfance).
Jérôme BOUTINAUD
Co-rédacteur en chef de la revue THÉRAPIE PSYCHOMOTRICE -et Recherches-
Jean Charles PICAUD
Professeur des Universités, praticien hospitalier, chef de service du service de néonatologie de l’hôpital de la Croix Rousse à Lyon.
Monique PERRIER GENAS
Psychomotricienne au Centre d’Action Médico Sociale Précoce de Vienne (38), détachée à l’hôpital général - équipe pédopsychiatrie de liaison pour intervention en services de maternité et de néonatologie 2A - chargée de cours à l’Institut des Sciences et Techniques de la Réadaptation (ISTR/ Université Claude Bernard Lyon 1).
Monique PERRIER GENAS
Psychomotricienne.
E. GOISET
Médecin pédiatre.
Monique PERRIER GENAS
Psychomotricienne.
Caroline PANISSET-PALLIER
CMPP-Arisse Mantes la Jolie caroline_pallier@yahoo.fr
Résumé :
Les études concernant les enfants autistes et leur corps portent principalement sur les comportements répétés et restreints dont font partie les stéréotypies motrices et les comportements sensoriels stéréotypés. Nous proposons d’étudier les autocontacts - dans une description quantitative et qualitative des manières de toucher son propre corps - au sein d’un groupe d’enfants autistes : l’analyse de leur investissement corporel permettra de progresser dans la compréhension de la dimension clinique complexe du corps dans l’autisme.
Nous cherchons à déterminer si une homogénéité existe au sein d’un groupe d’enfants autistes dans la manière de toucher leur propre corps, ou tout au moins envisager des profils selon leur fonctionnement. Au-delà de l’apport à une compréhension large du rap- port au corps dans l’autisme, notre étude peut avoir son intérêt pour des individualités a n de dégager des axes thérapeutiques en psychomotricité adaptés à chacun grâce à l’utilisation de l’outil que nous avons élaboré, ce que nous montrerons au travers de deux études de cas. Les résultats confirment l’hétérogénéité de la symptomatologie autistique dans la localisation et les occurrences des autocontacts. Parmi les dix enfants étudiés, les analyses des autocontacts ont permis de montrer que les parties du corps proches de l’axe et liées aux orifices sont plus souvent touchées.
Mots clés :
Autisme - Psychomotricité - Autocontact - Corps - Autosensualité - Procédés autocalmants.
Anne-Marie LATOUR
Psychomotricienne, service de pédopsychiatrie.
Cet article reprend les arguments développés lors d’une intervention proposée à l’Association des Psychomotriciens de l’Ouest (APO), le 9 avril 2011, lors d’une journée de travail sur « Les médiations en Psychomotricité ».
Résumé :
Le travail avec les enfants envahis par les archaïsmes de la pensée et du comportement (autismes, psychoses, états limites, carences graves) confronte à la nécessité de restaurer ou de refonder les contenants corporels. Il est alors utile de repérer un niveau très primaire d’être-au-monde relatif à la matérialité et à la forme du corps et qui se projette dans l’utilisation des objets du monde physique dans lequel il devient observable.
Ces objets, « choisis » pour leurs qualités sensorielles, figurent alors en miroir pour l’enfant, les états somato-psychiques qui le traversent mais, dans le même mouvement, bloquent son accès à l’émotionnalité et à l’imaginaire. Le corps et les fonctions corporelles peinent à se mentaliser, c’est-à-dire à s’éprouver et à « s’imaginariser ».
C’est au travers d’une fonction transitionnelle, assurée par le cadre-dispositif, que pourront se médiatiser les liens de l’enfant à son propre corps et à ses objets.
Mots clés :
Tonus - Enveloppe psychomotrice - Échotonie - Répertoire corporel.
Cristina DE LEÓN
Licence en Psychomotricité. José Ellauri 637 ap. 802 – e-mail cdeleonlaborde@gmail.com
Résumé :
L’auteur fait une brève histoire de l’évolution de la psychomotricité en Uruguay. Expose la posture actuelle en l’illustrant avec un cas clinique et fait allusion aux frontières entre la psychomotricité et la psychanalyse.
Mots clés :
Intégration Neuropsychologique - Corps - Interaction - Relation - Gestualité.